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38 témoins:
un film
magistral
sur la
lâcheté, la
culpabilité
et la peur.
Publication:
05/11/2012
15:16
Ecrivain,
journaliste
pour
le
cinéma
Le
réalisateur et acteur,
Lucas Belvaux, est né le
14 novembre 1961 à
Namur, en Belgique.
Lucas est
le frère de Rémy
Belvaux, acteur et
réalisateur du film
culte C'est
arrivé près de chez vous.
En 2003, il a remporté
le Prix Louis Delluc
pour sa trilogie: Un
couple épatant, Cavale,
Après la vie. En
2009, il réalise Rapt,
un film librement
inspiré de l'affaire
Empain, avec Yvan Attal.
Je suis
particulièrement
sensible au travail de
Lucas Belvaux, autant
comme acteur que
réalisateur. Son cinéma
est singulier, engagé,
porte sur des thèmes
graves où le fond et la
forme s'harmonisent.
C'est le cas pour 38
témoins qui part de
l'ambiguïté d'un fait
divers pour déboucher
sur un portrait des
dérives de la société
actuelle.
Synopsis
Le roman
de Didier Decoin, Est-ce
ainsi que les femmes
meurent?, dont est
tiré 38
témoins, se
déroulait à New York
dans les années 1960.
Lucas Belvaux le
transpose de nos jours,
dans la ville portuaire
du Havre.
Un
gigantesque
porte-conteneurs,
baptisé Andromède, entre
majestueusement dans le
port, accompagné du vent
et du fracas des vagues,
et sur la musique
concrète du
violoncelliste
anversois, Arne Van
Dongen. La nuit tombe,
la ville est déserte. Un
cadavre gît baignant
dans son sang dans un
hall d'immeuble. Les
gyrophares de la police
clignotent et les
sirènes retentissent au
loin, puis viennent
s'immobiliser devant la
scène de crime. Au
matin, l'enquête
commence. Allées et
venues dans les
escaliers de l'immeuble,
la police interroge.
Personne n'a rien vu,
rien entendu, tout le
monde dormait.
La
victime est une jeune
fille qui a été
poignardée sauvagement à
plusieurs reprises, et
qui s'est traînée de la
rue jusqu'à l'intérieur
de l'immeuble où son
assassin l'a achevée.
Quelques personnages
principaux émergent :
Pierre (Yvan Attal), un
pilote qui prétend avoir
travaillé toute la nuit
au port alors que le
spectateur l'a vu ne pas
ouvrir la porte à la
police. Sa femme, Louise
(Sophie Quinton), rentre
d'un voyage à
l'étranger.
Décontenancée par
l'attroupement devant
son immeuble, elle se
précipite chez elle pour
croiser un mari
silencieux, d'une
froideur
incompréhensible.
Une
journaliste du Havre
Libre (Nicole
Garcia) sonne à toutes
les portes du quartier
pour trouver des témoins
; pas facile, on ne
parle pas à la
journaliste.
Tout est
conçu pour dégager de
l'angoisse, les
mouvements des
conteneurs, les grues
mécaniques qui se
déplacent comme des
robots, le vent qui
siffle, la lumière
blafarde des réverbères.
La peur, le doute
s'installe, et entre
Sylvie (Sophie Quinton)
et Pierre (Yvan Attal)
la tension monte.
Puis
Pierre choisit de
revêtir son uniforme de
la marine marchande et
d'aller dire à la police
qu'il a, bien entendu,
cette nuit-là -- comme
tous les autres, qui se
sont tus par peur, par
lâcheté -- les cris
atroces de la jeune
femme qui résonnent
encore dans ses
insomnies. Alors, le
procureur le formulera
clairement : «Un témoin
qui se tait, c'est un
salaud. 38 témoins,
c'est monsieur
tout-le-monde. Je ne
poursuivrai pas.»
C'est
toute la grandeur du
film : Lucas Belvaux ne
cherche pas le criminel,
mais ce qui a rendu le
crime possible. Par son
aveu, Pierre a fait
exploser la honte, la
lâcheté, et c'est par la
scène finale, tragique
et bouleversante, que le
film prend tout son sens
: la reconstitution du
crime menée par Pierre
(Yvan Attal), terrassé
par la douleur, avec la
certitude que cet aveu
détruit sa vie à tout
jamais.
Un des
plus beaux films de
Lucas Belvaux sur la
condition humaine! |
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